Le Vieil Arbre des Pendus

Il est un vieil arbre à l'orée des bois
Qu'au matin les rayons caressent et dorent
Son écorce porte les marques d'autrefois
Des cicatrices qu'il chéri comme un trésor.
Aucunes guerres ni neiges l'ont abbatu
Et toujours il se tient haut et fort
Serein il est, et ce n'est pas qu'une fois
Qu'un oiseau sur sa branche s'endort.
Mais plus que lieu de sommeil, ma foi !
Ses bras ont étreint la corde de pendus.

La sang a coulé à ses pieds et on voit
Les traces bordeaux que le temps encore
Conserve sur sa peau et le soleil parfois
Les cache derrière la même rosée d'alors.
Bien qu'à ses pieds des hommes se soient battus
Il garde, sachez-le, les secrets de ces morts
Dans ses doux feuillages le vent, parfois
Ecarte les brindilles, ouvrant la boîte de Pandore
Plus d'une bataille il a remporté et la joie
A alors couvert le noir de ces bois éperdus.

Si je vous conte cette histoire de ma voix,
C'est pour qu'à l'avenir nul n'ignore
Que ce vieil arbre gisant à l'orée des bois
Là où la brume le matin doucement s'évapore
Fut, oh c'était à un âge maintenant perdu
Le dernier espoir et rêve de nombreux corps
Et je le dis, foi de troubadour, que des mois
Que dis-je ? Des années! il s'est tapi d'abord
Par la honte d'avoir, forcé par nos lois
Mené tant de gens au gibet, qui l'eut cru ?

Pardonnez cet arbre, Prince, croyez-moi
C'est lui qu'au fond fut condamnée à tort
Poussé à briser des vies malgré son choix
Il a su apporter un dernier sourire à tout ces morts.

Il est un vieil arbre à l'orée des bois
Qu'au matin prennent les regrets et remords.